Sur le chemin de Stevenson – Chroniques d’un voyage à dos de VTTAE

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Stevenson Itinérance

Il est des chemins qu’on ne prend pas pour aller quelque part.

On les prend pour voir ce que cela fait d’y être. Le GR70, que les géographes appellent “Chemin de Stevenson”, et que les poètes n’appellent pas car ils le parcourent, est de ceux-là.

Un trait qui serpente entre le Gévaudan, le Mont Lozère et les Cévennes, sur les pas d’un écrivain écossais et de son ânesse obstinée Modestine. Lui l’a fait à pied, avec une plume. Nous, en mai 2025, on l’a suivi avec deux VTT électriques, des sac dans le dos et une irrépressible envie de beauté sauvage, de silence, de pierres et de solitude.

Trois jours, trois morceaux de terre, de France, et l’impression d’un voyage plus grand que sa durée.

Une tranche de ruralité que l'on aime.

🧭 Prologue : Deux ânes modernes

Nous étions deux. Pas d’ânes mais presque : deux hommes, chacun son VTTAE tout suspendu, ses kilomètres dans les jambes et ses rêves dans la tête. Pas de grandes sacoches pendantes, mais de simples sacs à dos avec de quoi réparer, s'hydrater et se redonner du courage grâce à quelques gourdes et barres de nourriture énergétique.

Pour le reste : des batteries de 725Wh et 800 Wh, une trace GPX préparée grâce à UtagawaVTT, et ce luxe incroyable : ne rien avoir à prouver.

Après l'acheminement initial par la route et une écoute attentive de l'excellent épisode du podcast GDIY sur le Hellfest 🤘, nous voici arrivés à notre point de départ, prêts à vivre cette parenthèse enchantée de 3 jours.

Notre choix : rouler sur une portion du chemin de Stevenson. Pas la trace intégrale, non. Seulement la partie la plus enivrante pour nous et nos montures, de Langogne à Saint Jean du Gard.

Car on n’est pas venus chercher un exploit, juste une échappée de 3 petites journées. Exit le début original du parcours depuis Le Puy en Velay, à priori moins intéressant pour le VTT.

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🗺️ Jour 1 – Langogne → L’Estampe : Le goût du départ

Pas de bagages à transporter, grâce à La Malle Postale, fidèle service logistique au service des randonneurs flemmards. Nous, on enfourche nos montures sans fourbure. L’air a cette clarté des après midis de printemps. C’est le moment où le monde renait, et nous avec.

Les premiers kilomètres ne sont pas une mise en jambe, ils sont un enchantement. Les chemins roulent doux sous les pneus, les genêts explosent en jaunes incendiaires assortis à nos vêtements colorés, l’odeur des pins mêlée à celle de la terre sèche nous monte à la tête comme une IPA après une bonne balade.

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Au détour d'un village, on se prend à lire l'histoire de Saint Roch et de son chien. Puis, un château en ruine, vers Luc, trône comme un souvenir dont on ne se souvient plus. L’abbaye de Notre-Dame-des-Neiges, d’où l’on ressort avec deux bières et une impression confuse : trop récente, trop propre, trop sage pour être sainte, pourtant elle l'est.

Plus tard, les éoliennes. Des colosses d’acier qui brassent l’air comme les moulins de Don Quichotte. Sous leurs pales, on se sent minuscule et impressionné.

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On se rapproche de L’Estampe, petite halte perdue dans l’épaisseur du Gévaudan. Un dîner rustique à l’Hôtel des Sources à Chasseradès, puis une pause panoramique au viaduc ferroviaire de Mirandol avant de s'enfoncer dans une nuit douillette chez Christine.

Nos fessiers grincent, nos jambes râlent. On sourit. Le voyage commence à entrer dans le corps.

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🏔️ Jour 2 – L’Estampe → Bédouès : Le souffle du Mont Lozère

Le deuxième jour est celui du souffle. Celui qu’on perd dans la montée, celui qu’on retrouve au sommet.

Au Bleymard, arrêt café. On remplit les regards lors de notre passage au bar. Rencontre avec les chauffeurs de la Malle postale qui font une pause après avoir transféré des dizaines de sacs. On se réchauffe.

Puis vient la montée vers la station du Mont Lozère puis le col de Finiels. Un chemin, puis un sentier. Sur la fin, des blocs de pierre comme des pierres tombales dressées en file indienne bordent le passage. Les Templiers auraient pu tracer cette voie, nous y pédalons avec humilité et concentration, le single track creusé dans la prairie à l'herbe rase est étroit. On rencontre le seul randonneur qui se promène avec un âne. On lui tire le portrait.

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Au sommet le vent est fort. Il plaque le ciel contre la terre. La vue se déploie à 360°, comme un amphithéâtre où la nature joue son opéra muet. On s'abrite dans un refuge de pierre pour reprendre un peu d'énergie.

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La descente sur Pont-de-Montvert est un piège délicieux. On y croit, puis on pousse. Le vélo ne descend pas : il se débat. Le sentier devient trialisant, les pierres jouent à la marelle, les marches se suivent. Le Parc des Cévennes a prévenu le VTTiste avec une signalétique explicite, mais l’orgueil est une mauvaise oreille. Finalement, on finit à pied, la dignité en sueur, mais heureux d'avoir pu passer cette partie technique.

On se sustente en terrasse au bord du Tarn. La seconde partie de la journée nous fera pousser dès le départ puis passer par le col du Sapet à travers les bois et les genêts fleuris.

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Bédouès nous attend avec sa chapelle peinte, sa lumière douce, et un tipi en guise de gîte. Le patron du camping, ancien douanier, nous parle comme un homme qui sait ce que c’est que d’attendre. On s’endort engourdis par la température qui a baissé, au son de la rivière, ivres de vent, de vide et de vert.

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🌄 Jour 3 – Bédouès → Saint-Jean-du-Gard : Les derniers pas

Florac, le matin. Le pain croustille sous les doigts, la charcuterie est appétissante. La France profonde a bon goût.

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Le chemin devient voie verte, ancienne ligne de train rendue au peuple cycliste. Les roues sifflent doucement sur l'ancien ballast. C’est une mise en confiance, une illusion temporaire. Car la montée revient, plus raide, plus technique.

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À Saint-Germain-de-Calberte, on pique-nique sur un banc. On ne parle presque plus. Le silence s’est installé entre nous, comme un vieux compagnon. On est des copains, et les gourous du marketing chez Coca-Cola l'ont compris. Signe du destin.

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La montée au col Saint-Pierre est une belle ligne, régulière, presque joyeuse. On arrive à la ligne de frontière, on change de territoire et une borne centenaire sur l'ancienne route royale se dresse pour nous le rappeler.

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Puis... l’erreur. Une mauvaise interprétation de notre trace, on suit finalement le balisage du GR70. Une crête. Un sentier de chèvre. Trente minutes de poussage, de pierres, de râles, de doutes. On croyait finir en roue libre, on finit à bout de souffle, mais on finit.

Saint-Jean-du-Gard surgit comme une oasis. On s’y jette. Pas de bagages. Un frisson. Puis la camionnette de la Malle Postale surgit, providence sur quatre roues. Douche chaude. Rires nerveux. Fin du périple.

🧭 Épilogue – À dos de mémoire

Ce chemin, on l’a roulé, mais surtout on l’a vécu. Pas toujours en selle, mais toujours en mouvement ou en mode contemplatif. C'est beau.

Les genêts nous ont parfumé. Les pierres nous ont rappelé que la nature ne négocie pas. Et les villages, les visages, les silences, tout cela compose une musique qu’aucune enceinte ne diffusera jamais, même au Hellfest.

Nous n’avons pas fait d'exploit. Juste une belle page de liberté, à l'encre de la sueur, sur le sentier du temps.

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Pour en profiter :

Les traces :

⚠️ La montée au Sommet du Mont Finiels est interdite aux VTTs. Il faut pousser son vélo pour respecter la réglementation du parc des Cévennes.

Pour louer un VTTAE ⚡️, on vous recommande les services pros de AlpinesinBike et pour le transport des bagages et les acheminements 🚕, La Malle Postale.

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